vendredi 8 novembre 2024

Comment raviver un cliché?

 Comment raviver un cliché? examen d'un cas dans la littérature maghrébine. (un petit exercice ludique ou délire linguistico-littéraire d'un étudiant qui a pris de l'âge)

En marge de l'excellent texte proposé pour l'examen du baccalauréat. Les métaphores de l'oiseau et celle de la rivière telle que l'autrice les a évoquées m'a tout de suite interpellé, d'autant qu'elles figurent à la fin du texte pour ne pas dire qu'elle le clôt. Cette évocation de l'oiseau et de la rivière, qui peuvent, par ailleurs, paraitre usées, dans le cas de l'oiseau, et presque triviale dans le cas de la rivière par le "figement" qu'elle ont connu. La notion de figement convoque dans ce propos une notion au carrefour de la lexicologie et de la sémantique, le figement lexical, en l'occurrence. Le figement lexical, soit dit en passant, est un processus historique et complexe qui fait que les mots d'une expression n'ont plus d'autonomie sémantique en eux-mêmes, qui leur permet dans d'autres contextes de faire sens tous seuls. Mais dans le cas que j'examine ici, il ne s'agit pas de figement lexical, mais d'un autre processus plutôt sémiotique. Avant de poursuive le propos, il voici me semble plus judicieux d'examiner le passage en question afin de pouvoir expliquer ce que j'entends par figement : "Le fait de percer le vent m'élevait au rang d'un oiseau qui, dans son envol, dominait tout le paysage. Dans le temps, une rivière traversait un Jardin (Jnane) florissait et moi, Naima, j'avais dominé ma peur et les jugements des autres." On l'aura constaté, cette notion ne renvoie guère beaucoup à celle de figement lexical et n'a presque rien à voir avec elle. les deux mots n'apparaissent pas dans des expressions comme "être léger/libre comme l'air", ou " les petits ruisseaux font les grandes rivières" ( Le Petit Robert atteste beaucoup d'expressions de ce genre, surtout dans le cas du nom oiseau, qui a été plus productif). Je vais donc me hasarder à dire que, dans ce cas, il y a figement iconique. Bien sûr l'expression ne veut rien dire et s'apparente à ce que l'expression "faire du Damourette et Pichon" signifie- c'est-à-dire, créer une terminologie novatrice et quasiment incompréhensible pour celui qui ne connait pas les deux grammairiens impliqué dans cette expression. Mais faute de terme adéquat, je voudrais utiliser cette expression pour dire que certains mots, par leur valeur connotative, commencent à fonctionner comme des symboles, (jusque là on n'a pas réinventé la roue), et partant vont procéder comme '"un code particulier". revenons à nos deux noms pour mieux expliciter le sens du propos. l'emploi du om "oiseau" sauf chez Guillaume Apollinaire (Clin d'œil à Samir Marzouki et Mansour Mhenni) symbolise, entre autres choses, la pureté, l'innocence, la beauté, mais surtout la liberté, symbole qui vient presque systématiquement à l'esprit. Il y a également dans le vol de l'oiseau un mouvement ascendant, mais aussi descendant,- donc alliant le céleste et le terrestre- qui n'est pas sans rappeler de beaux vers de la poésie mondiale ( l'albatros de Baudelaire, l'aigle de Chebbi, et j'en passe), mais qui rappelle aussi le sphinx, l'animal mythologique a visage d'Homme et corps d'oiseau, qui renait de ses cendres. Bref, une image divine si l'on part du principe que seul Dieu dispose du pouvoir de redonner vie après la mort. Dans cette perspective, la symbolique du sphinx comme demi-dieu dans la mythologie païenne, n'est pas sans rappeler une expression cette fois arabe qui accompagne systématiquement l'évocation de Dieu "الله تعالى". Cette expression, qui se traduit par "celui qui s'élève", nous renvoie de manière systématique au verbe "élever" utilisé par l'autrice " m'élevait au rang d'un oiseau ", écrit-elle. Laissons de côté un peu cette interprétation à laquelle je vais revenir un peu plus loin. — avec Ali Omri et
19 autres personnes
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Mais qu'en est-il du mot "rivière"? En vérité, le mot ne semble pas avoir une symbolique que l'on peut cerner à partir d'un paradigme fermé. Il faudra donc la construire par un effort combinatoire. Le mot rivière renvoie à l'élément liquide, donc à la vie. Mais, l'une des caractéristiques des cours d'eau consiste aussi dans le fait qu'ils représentent un élément libre dans la mesure où même lorsque nous essayons de lui barrer la route, sa force peut bien créer des catastrophes. L'élément liquide peut donc lui aussi être le symbole de la liberté.
Il est donc possible de conclure que les deux éléments se croisent symboliquement sur l'axe Liberté. En admettant cette interprétation, on admettra par inférence que le fait que les deux peuvent constituer des métaphores de la Liberté, et partant que nous sommes face à une espèce d'allégorie . A ce niveau nous aurons besoin du secours de l'approche sémique (sémantique) de notre allégorie. ces mots sont " les verbes "élever" et "dominer" d'un côté, et "florir", de l'autre. Le verbe "élever" présente une palette synonymique très riche qui tourne autour de l'idée de la grandeur et d'augmentation de la valeur. Ces sèmes, permettent ainsi de rapprocher le verbe à d'autres, probablement moins chargé en connotation parfois, tels que "hisser, hausser, surélever, relever", mais surtout "d'ennoblir". Ce dernier synonyme, croisé avec l'image de l'oiseau, nous met face à un être qui ne se sent plus rabaissé par le paysage -qui peut être interprété comme une image de la société. Bien au contraire, le personnage se sent percer, et je dirai même "déflorer" le vent- acte violent qui matérialise aussi ce pouvoir que le personnage a conquis à travers une expérience qui ne choque plus dans notre société actuelle, en l'occurrence, la conduite de la bicyclette et les autres engins, fussent-ils lourds ou légers, mais qui était prohibée par la société dont elle dessine les contours à travers l'attitude de son père. la complexité de l'image est accentuée par le verbe "dominer" qui porte dans ses gênes, non seulement l'idée de hauteur, dans le sens de surplomber, mais aussi celle de subjuguer, de commander, de régner, bref, de s'affirmer dans une position de pouvoir et de liberté. La combinaison de ces deux verbes avec l'idée de l'oiseau accentuée par le verbe "percer" permet d'inférer qu'il s'agit là d'un mouvement par lequel le personnage se sent fendre, ouvrir une brèche dans quelque chose et même briser quelque chose qui n'est autre que les chaines qui accablent son aspiration à la liberté- Chebbi n'avait-il pas formulé le vœux de briser les chaines de la tradition?. De ce point de vue, les deux allégorie de la rivière et de l'oiseau constituent non plus un simple procédé rhétorique dont nous n'avons pas fini de déconstruire son architecture esthétique, mais surtout l'allégorie politique formulée à travers une phrase mise dans la bouche du personnage "(...) les droits s'arrachent et ne sont nullement accordés" et un cri édulcoré et pourtant lancinant (aussi paradoxal que cela puisse paraître) de l'autrice qui fait le procès d'une société orientale qui ne cesse de bafouer les droits des femmes à travers une violence symbolique qu'on appelle souvent tradition, ou encore qu'on associe à l'identité arabo-musulmane. Quant au verbe "florir" dont les synonymes peuvent être "éclore" comme une fleur à la fois protégée par le calice et emprisonnée par les sépales qui sont autant de sentinelles, de verrous que la fleur éclose a doucement brisés dans son épanchement naturel vers la Liberté. De même la narratrice à qui l'écrivaine fait commettre un parallélisme entre l'image de la rivière, l'élément liquide, la rivière qui contribue à la floraison du Jardin (Jnane), et la protagoniste de la fiction elle-même, à travers la conjonction "et", qui en conduisant le vélo maîtrise ses appréhension et "éclot" au sens politique de s'émanciper, de s'affranchir du joug de la société dont les sentinelles, les gardes du temple, demeurent éveillés et actifs, justement comme les épales du calice qui même en accusant un mouvement vers la terre, demeurent là rattachés au calice, comme pour nous rappeler que l'épanchement naturel à Liberté et à l'égalité avait pour revers de la médaille le poids de la convention sociale. Voilà la complexité de ces deux phrases et le travail stylistique de l'autrice ainsi que la densité symbolique du matériau linguistique mis en œuvre dans ce passage du texte nous ramener au problème de départ, à savoir, la revitalisation d'un cliché. L'écrivaine a justement brillamment réussi à redonner vie à des symboles usés au propre et au figuré, à des clichés, afin qu'ils aient une valeur politique et révolutionnaire, comme pour dé-figer le symbole et le refonctionnaliser.

Damascène de rose!

 Altière, une damascène me surprit

Entre deux fillettes, au loin, qu'elle protégeait d'un

Feuillage verdoyant et d'un arbre qui, sans se soucier, buvait à leurs eaux

En me rapprochant, je la vis leur expliquer

Que les pihis à l'unique aile ne volent plus en couple

Dans sa pédagogie elle semblait souffrir

Des dards qui lui ont été administrés

Et je lui dis: ô, toi, reine des roses,

comment... comment peux-tu, effilochée, ta beauté dégager ?

Comment peux-tu continuer de protéger?

J'aime voir ton éclosion, et je rate

Mais le soleil ne m'éclaire que peu

Et la verdure que tu nourris te cache

Je voulais pourtant te voir claire, limpide

Mais.... Parfois, la lumière m'éclabousse les yeux

Et ils peinent de ne pouvoir s'avancer vers

Ton suc et à en percer le secret Aodo-rablant!!

Le vent est violent par cette journée ensoleillée

Et tu te dandines sur ta scène Déesse

Punique narguant les menaces romaines

Déesse arabère contre l'oubli et l'injustice

L'histoire, la nôtre, te retiendra et n'oubliera

Jamais ta senteur mère de toutes les senteurs

Nous nous verrons toujours sur terre !

Car, tu n'es pas un brin de bruyère que l'on salue

Tu es LA ROSE!!! TU ES GÉNÉROSITÉ !




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Aroussia Kaabi, El May Wahida et 35 autres personnes

Contrastives

 

Assassins, les mots qui fuient sur l’axe linéaire

Assassinés, les mêmes mots qui ont fui….

À quoi bon tisser une vaine avoine verte,

Si les veines sont asséchées ?

Que peut l’avoine face au gel que le feu ne lénifie point ?

Que peut un brin de bruyère si on ne le voit plus ?

Que peut une rose de Damas contre l’attente et l’oubli ?

Homme plein de raison que la nature pourrit avec sa sélection…

Homme de peu de raison dont les ailes voient leurs plumes tomber…

Après tout, les feuilles tombent bien en automne et l’arbre n’y peut rien…

Tend le drapeau et avance, toi que l’on ne voit point…

Remue le ciel et la terre que je n’entendrai rien… que je ne te verrai point…

Dis-leur à la fin que j’ai tissé la mauvaise avoine vaine…

Ou que j’ai simplement vécu le temps sans le savoir par raccroc ou par hasard…

Il sera temps parfois de s’arrêter tel une phrase à un point…

Une phrase labile que tu n’entendras point… et qui survivra, ludique…

Vas dans les champs… cueille des mots-cerises…

Jette l’écume dans les marrons glacés…

Au temps des cerises, il n’y a point que la neige printanière…

Au temps des clémentines, il y aussi le cédrat…

Fais ta tisane de mots asséchés et endors-toi dans un souvenir.

Teburbu Minus, le 29/10/2024

(P)lèvres

 


Un psaltérion sans cordes… vacarme dans ma tête

Un beau Bacchus y fait le mouvement inverse de minerve

Et se prend dans les rets de Poséidon

Au lever, il pleut des mots que je pleux involontairement…

La route est si lente que je ne la vois plus…

Seul un objet magni-léfique me la souffle doucement dans les cordes de Mahbouba

Je bois à ma faim l’éclair des pluviôses nuées en sirotant une salive qui tarit

Et une  bouche sèche trop sucrée qui cherche l’empathie du café

Homme de paroles, la solidarité du café n’a jamais été son fort

Car l’image délinéée du café ne peut les supporter…

Homme social, animal qui parle, Vautre-toi, sans te soucier, dans le silence

Vouloir ne se met jamais à l’impératif et le sentiment est un infinitif rauque…

Ce n’est que par accident qu’il t’arrive de régir, car sans l’infinitif tu risques de mourir

Va, vis sans devenir et n’oublie point les roses qui auprès de toi éclosent…

Le poumon doit à la plèvre ce que la rose doit à son épine…

Ce que langue doit aux lèvres et ce que tes nuits doivent aux jours….

Tout le pari est là !

Souvenir d’un 28/10/2024 de D…. à .M….

Un ciel qui égale le ciel (Traduction de سماء بحجم السماء de Faouzia Aloui)


سماء بحجم السماء شعر فوزية العلوي

سأنتعل المفردات التي لا حسيس لأحرفها

وأبتدئ الانحدار إلى سبل

 ليس يعرفها السّالكون

سأنتظر النّجم أن يتعالى

وأبدأ قطف الكلام الذي في الظّنون

سأحذف كلّ حروف النّداء

لكي لا يعاتبني عابر

عن سماء مغيّمة في الرّبيع

ولا  عن خريف تأخّر في الاصفرار

ولا عن مساء تبدّد دون  حنين  ودون انتظار

وكي لا تجيئ النّساء إليّ يطالبنني

بالبكاء على راحل لم يكم عالما

بالفَراش الذي وهب العمر للاحتراقْ

 

ويسألنني عن حبيبي

الذي لم يكن عالما بالشّجونْ

سألتحف المفردات الخفاف

كريش الطّيور الوليده

وأبدأ شدوا فريدا

وأبحث في باحة العمر عن المستحيل

أريد سماء بلا سحب  من دخان

وماء على رفرف القلب يجري

وأرضا تعهّدها الله بالأقحوان

أريد مصابيح لا تنطفي أبدا بالرياح

وأفقا بلا حرس من غيوم

أريد معاريج للأمنيات

 وقافلة للسّنونو تؤثث للأغنيات

أريد أنا ماذا كنت أريد

أريد لتونس ليلا أليفا

 بلا حارس

وصيفا يبيع على حافة القلب ماء

وعطر سماء مكلّلة  بالحبقْ

أريد طيوفا تظللّنا بالأماني

وفجرا يرقْ

أريد أنا للبلاد التي أرضعتنا ومدّت لنا

قلبها كي نكون...

سماء بحجم السّماء

وشمسا نظللها بالجفون ...

نريد لها أن نكون فداها

وليس بنا أبدا من يخون

Je chausserai le lexique aux graphèmes taciturnes

Et j'entamerai ma descente vers les sentiers des randonneurs inconnus

J'attendrai que s'élève l'étoile

Et je commencerais à cueillir les mots

Je bifferais toute apostrophe

Pour que personne ne me reproche aujourd’hui

Le ciel ennuagé du printemps

Ni l'automne où les feuilles tardent à jaunir

Ni encore le soir qui s'effrite sans attentes ni nostalgies

Pour que ne viennent pas les femmes me réclamer

De pleurer un passant qui ne savait les secrets des papillons qui sacrifient la vie sur l'autel du feu

Pour qu'elles ne m'interrogent pas sur mon amant qui ignorait mes chagrins

Pour voile je prendrais les mots aussi légers que le duvet des oisillons

Et j'entonnerais un chant unique

En poursuivant l'impossible dans le patio de la vie

Je voudrais un ciel sans nuages ni fumées

De l'eau s'écoulant sur les traversins du cœur

Et une terre que Dieu bénit par les chrysanthèmes

Je voudrais des chandelles que les vents jamais n’éteindront

 Et un horizon exempt de tout nuage sentinelle

Je voudrais des strapontins pour les souhaits

Et des moineaux en caravane qui meublent les chansons

Et un été, aux bords du cœur (de mon cœur) vendant de l’eau

Et le parfum d’un ciel couronné de basilic

Je voudrais des chimères qui nous abritent par des espérances

Et une aurore qui s’adoucit

Je voudrais, moi, ce que j’ai toujours désiré

Je voudrais pour la Tunisie une douce nuitSans sentinelles

Moi, pour le pays qui nous a allaités et servi son cœur pour qu’on soit 

Je voudrais …..Un ciel qui égale le ciel

Et un soleil que nous abriterons sous nos sourcils

Nous voudrions pour elle être ses soldats

Sans que, parmi nous, jamais il n’y ait de traître.

Comment raviver un cliché?

  Comment raviver un cliché? examen d'un cas dans la littérature maghrébine. (un petit exercice ludique ou délire linguistico-littéraire...